Le 29 janvier 2021, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture et avec une large majorité, la proposition de loi n°3661 visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale.
Cette loi vise principalement à lutter contre les sévices infligés aux animaux mais, également à lutter contre l’abandon.
Pour être définitivement adoptée, cette proposition devra également être votée par le Sénat et promulguée par le Président de la République avant d’être publiée au Journal Officiel.
Cette proposition de loi s’articule autour de quatre piliers :
La détention et l’acquisition des animaux de compagnie :
L’article 1 er de la proposition de loi soumet la première acquisition, à titre gratuit ou onéreux, d’un animal à la signature d’un certificat d’engagement et de connaissance des besoins spécifiques de l’espèce. Son contenu ainsi que ses modalités seront précisés ultérieurement par décret.
Le respect de cette obligation sera notamment à la charge du cédant qui devra s’assurer de la signature de l’acte par le cessionnaire.
Dans cet esprit, plusieurs amendements ont été ajoutés :
Tout d’abord, les cessions en ligne d’animaux de compagnie devront transiter par un site spécialisé et non plus sur les sites d’annonces en ligne type Leboncoin.
De même, dès 2024, la vente en animalerie des chiens et des chats sera proscrite.
Par ailleurs, la vente d’animaux de compagnie aux mineurs sera interdite en l’absence du consentement des représentants légaux.
Autre innovation majeure, un amendement crée le mandat de protection animale. Ce nouvel outil juridique permettra aux propriétaires d’anticiper le devenir de leurs animaux en cas de décès ou d’incapacité, en le confiant à une tierce personne de leurs choix.
Par ces mesures, le législateur semble prendre acte du fait qu’un animal n’est pas et ne doit plus être appréhendé comme un simple objet dont l’on peut disposer librement et inconsciemment.
Destinées à responsabiliser les futurs propriétaires, ces dispositions ont pour finalité de réduire drastiquement le nombre d’abandons et d’inciter les gens à adopter plutôt que d’acheter des animaux.
La France a en effet un progrès significatif à faire en la matière puisque plus de 100.000 animaux sont, tous les ans, abandonnés sur notre territoire.
Par ailleurs, la création d’un « mandat de protection animale » semble confirmer le fait que celui-ci doit être distingué des autres biens constituant le patrimoine de son détenteur.
Enfin, les sanctions relatives au non-respect dudit certificat demeurent floues, nous ignorons si des sanctions spécifiques seront créées ou si, à l’instar du droit des contrats, le non-respect des engagements conventionnels entraînera tout bonnement la rupture de l’acte.
Durcissement des sanctions relatives à la maltraitance. Actuellement, les actes de maltraitance réalisés à l’encontre des animaux de compagnie sont punis d’une peine de 2ans d’emprisonnement et 30.000 € d’amende par l’article 521-1 du Code pénal. L’article 8 de la loi entend passer cette peine à trois ans d’emprisonnement et 45.000€ et 5ans d’emprisonnement et 75.000€ lorsque ces mêmes actes ont entrainé la mort de l’animal.
Par ailleurs, le fait de donner volontairement la mort « à l’état simple » à un animal entraînera une peine de 6mois d’emprisonnement et 7.500€ d’amende alors qu’aujourd’hui, ces faits sont simplement passibles d’une contravention de 5 ème classe.
Dans le même esprit, un stage de sensibilisation relatif à la prévention et à la lutte contre la maltraitance animale pourra être prononcé soit au titre de peine complémentaire, soit au titre de peine alternative à l’emprisonnement.
De même, une infraction d’abandon aggravé est également envisagée faisant passer la peine à 5ans d’emprisonnement et 75.000€ d’amende dès lors que les conditions relatives à l’abandon sont de nature à mettre directement ou indirectement en péril la vie de l’animal.
Actuellement, l’abandon est envisagé de façon générale par le législateur et réprimé de deux ans d’emprisonnement et 30.000€ d’amende. Lorsque ces faits seront réalisés, même à l’état simple, par le propriétaire de l’animal, la peine sera également portée à 5ans et 75.000€ d’amende.
Enfin, une infraction d’enregistrement et de diffusion d’actes zoophiles ou de sévices envers les animaux sera créée pour mieux lutter contre cette tendance aussi honteuse que récurrente.
Les peines applicables en cas de mauvais traitement envers les animaux étaient jusqu’alors absolument inappropriées et dérisoires. Ce faisant, le législateur entend punir plus lourdement les auteurs d’actes de maltraitance, permettant ainsi de lutter plus efficacement contre toutes formes de maltraitance animale. L’ajout de l’infraction autonome « d’enregistrement et de diffusion de sévices sexuels ou d’actes de cruauté » est d’autant plus opportun que cela se répand tristement sur les réseaux sociaux tel que Snapchat comme les funestes actualités des semaines passées nous l’ont tristement rappelé.
Cette infraction nouvelle a le mérite d’étendre la sanction, non seulement à celui qui lui inflige directement l’acte de cruauté mais, également à celui qui, pour des raisons nauséabondes, filme et publie ces faits.
L’interdiction d’exploitation des animaux sauvages
L’article 12 de la proposition de loi entend interdire la commercialisation ainsi que le transport des animaux sauvages en vue de les présenter au public dans le cadre de spectacles itinérants. Par ailleurs, celle-ci interdit plus particulièrement la captivité des cétacés dans des centres autres que ceux destinés à leur prodiguer des soins.
Dans le même esprit, la reproduction de ces animaux placés en captivité sera dorénavant interdite. Ces mesures visent notamment à mettre fin à la présence d’animaux sauvages dans certains cirques mais, également dans des fêtes privées ainsi que dans des émissions télévisées. Par ailleurs, cela aura pour heureuse conséquence d’interdire la représentation de dauphins ou d’orques comme cela peut être le cas dans des structures telles que Marineland ou le Parc Astérix et son triste « spectacle des dauphins et otaries ».
La fin de l’élevage de visons d’Amérique destinés à la production dE fourrure. L’article 15 de la proposition de loi entend interdire les élevages des visions d’Amérique et de tout autres animaux non-domestiques exclusivement élevés pour leurs fourrures.
Par cette proposition, le législateur semble prendre conscience que l’animal n’est pas un accessoire destiné à « embellir » l’Homme. Cette disposition est d’autant plus bienvenue lorsque, rappelons-le, la France a fait abattre plus d’un millier de visons, dans le cadre de l’épidémie de COVID 19. A cet égard, certaines maisons de couture, à l’instar de Balenciaga et Alexander McQueen, ont d’ores et déjà renoncé à l’utilisation de la fourrure animale dans leurs prochaines collections.
Bilan :
Si l’ensemble de ces mesures doivent être accueillies positivement, force est de constater que le progrès reste timide.
En effet, si les animaux de compagnie voient leurs sorts s’améliorer, la rupture d’égalité qui réside entre eux et leurs homologues sauvages ne fait qu’accroître.
Par ailleurs, il est aussi regrettable que l’interdiction de vente de chiens et chats en animalerie n’ait pas été étendue aux NACS qui, eux aussi, vivent dans des conditions trop souvent inadaptées et précaires.
Cette rupture d’égalité se constate également à travers la différence qui est opérée entre les spectacles itinérants et les autres puisqu’à n’en point douter, un lion n’est pas jamais fait pour se produire en spectacle, que cela soit avec itinérance ou non.
De plus, s’il est réjouissant que les spectacles de cétacés prennent fin, il est malheureux qu’une telle interdiction n’ait pas été étendue aux corridas qui demeurent être les plus morbides et infâmes des spectacles.
Enfin, d’autres sujets pourtant décriés par l’opinion publique tels que l’élevage intensif et la chasse à courre restent les grands absents de cette proposition.
En somme, comme disait Monsieur Philippe MEYER, « le progrès a encore des progrès à faire » !